#01- L'IDÉE GÉNIALE DE KRISTY
Scénariste(s) : Raina TELGEMEIER, Ann M. MARTIN
Dessinateur(s) : Raina TELGEMEIER
Éditions : Scholastic
Collection : X
Série : Club des Baby-Sitters
Année : 2006 Nb. pages : 186
Style(s) narratif(s) : Récit complet (Comics)
Genre(s) : Quotidien, Récit psychologique, Drame familial, Adaptation littéraire
Appréciation : 4 / 6
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Parlez-moi de ça, des filles organisées!
Écrit le mercredi 07 septembre 2016 par PG Luneau
Tomes lus : #01 - l'Idée géniale de Kristy
#02 - le Secret de Stacey (142 p., 4,5 / 6)
#03 - Bien joué, Mary Anne! (2007, 156 p., 4,5 / 6)
#04 - Claudia a des ennuis (2008, 170 p., 4,5 / 6)
Le Club des Baby-Sitters! S'il est une série de romans qui a fait fureur auprès des jeunes filles, dans les années 80-90, c'est bien celle-là! Aux 131 romans réguliers (!?!!), il faut rajouter les Super-Spéciaux, les Mystères, les Super-Mystères, les livres-portraits, les «Friends forever»... En tout et partout, plus de 200 romans ont vu le jour... même si «seulement» 85 d'entre eux ont été traduits et publiés chez nous, par les éditions Héritage Jeunesse!!
Dans toutes les écoles du Québec (et d'Amérique!), les jeunes filles s'échangeaient ces livres aux couleurs pastel... et, si je me fie aux nombreux sites qui en parlent sur le Net, les jeunes Européennes ne semblent pas avoir été en reste!
Depuis quelques années, la série a été rééditée un peu partout. En Europe, le génial Émile Bravo en a illustré quelques couvertures. Aux États-Unis, c'est à Raina Telgemeier qu'on a demandé de le faire... Le style simple, frais et dynamique de l'auteure de Souris!, Sœurs et Drame colle tellement bien à la série qu'on n'a pas eu le choix de pousser plus loin l'expérience : voilà que Raina a commencé une série de transpositions de ces romans en BD!! ;^D
J'ai eu le plaisir de lire les 4 premiers (reprenant respectivement les romans #1, 3, 4 et 7), grâce aux bons soins du service de presse des éditions Scholastic... et je dois avouer que j'ai été agréablement surpris par ce que j'ai découvert!! ;^)
Bon, avouons-le sans détour : j'ai, en partant, un parti pris plus que favorable à l'égard de Raina Tegelmeier! Son style graphique possède toutes les qualités que je préfère dans une BD : clarté, simplicité, souplesse, efficacité, esthétisme, rigueur... Et, dans le cas présent, les vives couleurs de Braden Lamb auraient fini de me combler... si je ne l'avais pas déjà été! ;^)
Mais ce sont les récits imaginés par Ann M. Martin, l'auteure de la série originale, qui m'ont le plus surpris. Je ne m'attendais pas à des histoires aussi bien construites, et aussi judicieusement près des jeunes filles de 9 à 13 ans!?
Le tome #1, narré par Kristy, la leader du groupe, relate la fondation du club et les petits déboires à survenir lors de leurs premiers contrats.
Le tome #2, lui, nous est raconté par le biais de Stacey, la petite nouvelle du groupe. Il traite de sa maladie... dont elle fait tant de mystère! De plus, le club s'y voit confronté à une organisation rivale aux pratiques publicitaires déloyales. Les filles auront fort à faire pour regagner leur clientèle, les lois du marché étant ce qu'elles sont!
C'est la douce et timide Mary Ann qui prend le relais de la narration dans le tome #3. Elle nous raconte le terrible conflit qui risque de causer la fin du club mais, surtout, celle de sa belle amitié d'enfance avec Kristy! Cet intermède a au moins le mérite d'introduire Dawn Shafer, la 5e membre du club.
Puis, c'est Claudia qui s'ouvre à nous dans le tome #4. Elle nous révèle ses difficultés scolaires, son grand intérêt pour les arts et sa douloureuse rivalité avec Janine, sa bolée de sœur aînée. Comme souvent, il faudra un drame familial pour ébranler un peu le pattern dans lequel ces deux filles étaient enfermées et pour forcer le dialogue.
Comme vous pouvez le constater, on se retrouve vraiment en présence de sujets et d'intérêts très féminins. Je ne connais pas beaucoup de jeunes hommes qui s'intéresseraient à ces récits... mais je connais fort peu de jeunes filles qui y resteraient insensibles! ;^) Jalousie, culpabilité, doute et inquiétude sont de la partie, mais aussi (SURTOUT!) esprit d'initiative, débrouillardise, entraide, complicité, empathie, persévérance, authenticité et responsabilisation sont au programme... sans compter les incontournables chicanes de fifilles, le tout d'une impressionnante véracité! Mon petit doigt me dit qu'Ann M. et Raina ont déjà fait du gardiennage... et qu'elles ont déjà été jeunes filles!! ;^D
Donc, je n'hésite pas une seconde à recommander à toutes les jeunes adolescentes cette excellente série qui, grâce aux talents d'adaptatrice d'une illustratrice exceptionnelle, n'a pas pris une ride!!
Plus grandes forces de cette BD :
- le dessin de Raina, d'une redoutable efficacité. Comme je l'ai dit plus haut, il colle parfaitement à la série : c'est comme si l'univers de madame Martin avait été conçu pour rencontrer le talent de madame Telgemeier!! ;^) Et les couleurs franches et vives de Braden Lamb améliorent, si c'est encore possible, l'ensemble!!
- l'idée principale à la base de la série! Quelle belle initiative que de fonder un regroupement de gardiennes d'enfants pour faciliter la vie des parents qui cherchent à faire garder leur progéniture! Au lieu de faire 4, 5 ou 6 appels avant de trouver quelqu'un de disponible, les gens de Stonebrook téléphonent au club et rejoignent d'un coup un bassin de 4 (puis 5, puis encore plus, car le groupe grandira dans les prochains tomes, si je me fie à ce que le Net dit des romans!) gardiennes potentiels, qui centralisent leurs disponibilités dans le même agenda. C'est à espérer qu'une telle idée donne le goût aux jeunes lectrices de la mettre en pratique!! ;^)
- une belle brochette de personnages principaux. Quel quatuor intéressant! Les filles sont toutes différentes, chacune est bien typée, avec ses spécificités : Kristy la leader énergique, Mary Anne la timorée surprotégée, Claudia l'artiste un brin rebelle et Stacey, la nouvelle un peu plus glamour et attirée par les garçons!? Chacune a ses préoccupations personnelles, bien de son âge (problèmes familiaux, rêves d'avenir, difficultés scolaires, maladies... et mêmes aspirations sentimentales!! ;^) Chacune est donc très crédible : les jeunes ne pourront pas ne pas se reconnaître dans l'une ou l'autre d'entre elles!!! Ma préférée? Mary Anne, dont la fragilité et la situation familiale m'ont particulièrement touché.
- quelques petits mystères sympathiques. La maladie de Stacey est amenée à coup de petits indices clairsemés, de plus en plus intrigants. Même chose pour la présence des deux nouvelles membres, dans le tome #2 : leur attitude de plus en plus louche nous met doucement la puce à l'oreille sur leurs réelles intentions.
- les reproductions des pages du «cahier de bord» du club. Au chapitre #7 du tome #1, il est décidé que, suite aux séances de gardiennage, chaque membre du club noterait ses expériences, bonnes ou mauvaises, dans un petit cahier, de manière à ce que les autres puissent tirer profit des bonnes idées... ou ne fassent pas les mêmes erreurs!! À partir de là, ces pages servent souvent d'introduction aux chapitres. Elles nous donnent un aperçu rapide de ce qui surviendra dans les pages à venir. De plus, les éditeurs ont pensé à utiliser des typographies différentes, question de personnaliser l'écriture de chacune des membres du club! Wow! ;^)
- la belle caractérisation des enfants! Plus la série avance et plus on fait la connaissance de différents enfants, chez qui nos héroïnes vont garder. Ces jeunes deviennent donc des personnages secondaires importants... et chacun est crédible et différent!! Mme Martin, dans les romans originaux, a su trouver des éléments très justes et typiques : la fille de Wilson est une pipelette incroyable... mais tout à fait dans le ton : on croirait presque entendre son sempiternel babillage! Puis il y a la petite peste trop gâtée, le jaloux, l'intrépide, le easy going... Pour côtoyer des jeunes à longueur de journée depuis plus de 27 ans, je peux vous assurer que les attitudes et réactions de toutes ces petites personnes sont tout à fait réalistes!! Bravo!
- une traduction bien de chez-nous. Quand j'ai lu, à la fin du tome #1, que les jeunes voulaient manger des Pop-tarts, j'ai bien compris que j'avais affaire à une traductrice tout ce qu'il y a de plus québécoise!! ;^) Isabelle Allard a fait un excellent travail : elle a choisi de garder les noms originaux et de conserver le contexte américain (ça se passe aux États-Unis, contrairement aux traductions québécoises des anciens romans, où tout avait été transposé au Québec), mais dans un langage que tous comprendront, tant ici qu'en Europe!
- la jolie maquette de la série. Bien qu'originale, sa facture et les couleurs pastel qu'elle expose me rappellent, curieusement, la maquette des romans originaux... même si elle en est pourtant très différente et éminemment plus moderne!?
- la justesse des émotions présentées. Tant au niveau des gardiennes que des jeunes enfants qu'elles maternent, les émotions sont rendues avec beaucoup de finesse, particulièrement dans le tome #4, où la rivalité entre Claudia et sa sœur et l'accident de leur grand-mère génèrent beaucoup d'intensité. Et on sent bien l'évolution des personnages. Bravo!
- le changement de narratrice à chaque tome! En plus de nous permettre d'en apprendre plus sur l'univers familial de chacune des héroïnes de la série, cette fantaisie narrative nous donne accès à différents points de vue sur une même situation, ou sur une même personne. Non seulement on se retrouve devant un portrait plus juste de cette situation ou de cette personne, mais ça démontre aux lectrices que tout peut être nuancé, surtout si on se place dans la peau d'une autre! Génial!
- le making-off !! En effet, dans un supplément de 7 pages, à la fin du tome #4, on nous explique de manière très claire comment Raina réalise les différentes étapes de son travail. On y raconte comment elle part du roman qu'elle annote pour le transposer en scénario, coupant cette petite anecdote-ci, inversant ces deux scènes-là... Puis, plus classiquement, on nous montre les étapes du découpage, du crayonnée, de l'encrage, du lettrage et de la mise en couleurs. C'est succinct mais suffisamment bien fait pour que tout le monde comprenne rapidement.
Ce qui m'a le plus agacé :
- plusieurs petites longueurs dans le premier tome. Bien évidemment, ce premier opus s'en veut un de mise en place : il est donc, par la force des choses, plus lent... Raison de plus, donc, pour ne pas perdre une planche à nous montrer que le petit frère va bel et bien à la toilette (p.12) ou que tout le monde est en train de jouer au ballon captif (p.50)!! Ces deux planches ne font que ralentir la narration!!?
- de petites incongruités! D'abord, au début du premier tome. Alors qu'on vient d'apprendre que Kristy garde son plus jeune frère après l'école, en alternance avec ses deux grands frères, ceux-ci entrent et invitent leur sœur à les accompagner au parc pour jouer au football!? Ne réalisent-ils pas que c'est la journée de garde de Kristy et qu'elle ne peut abonner son petit frère tout seul à la maison?!? :^S Puis, dans le tome #3, à la p.69, Mme Pike demande une gardienne pour le vendredi suivant... mais l'image nous montre Mary Anne qui regarde explicitement la journée du samedi dans leur calendrier!!? Je serais curieux de savoir s'il s'agit là d'une simple erreur de traduction ou si cette bévue se retrouve aussi dans la version originale anglaise de la BD??!
- deux erreurs de français : un fort déplaisant «si on aurait...» à la p.92 du tome #2, puis une coquille homophonique, à la p.59 du tome #3 : ou / où...
- deux maladresses narratives, maintenant. Je commencerai par l'arrivée impromptue des jumelles Shillaber, qui retontissent dans le tome #3 avec le titre de bonnes amies du groupe... alors qu'on n'avait jamais entendu parler d'elles dans les deux tomes et demi qui précèdent!! Puis, avouez avec moi que cette histoire de retrouvailles entre le père de Mary Anne et la mère de Dawn est cousue de fil blanc et un peu difficile à avaler!! C'est romantique et mignon tout plein... mais assez tiré par les cheveux!! D'autant plus qu'on voit tellement venir la suite!! :^(
- la rapidité de la lecture. Malgré l'épaisseur relative des bouquins (de 142 à 186 p., ce qui n'est pas rien!!), ceux-ci se lisent très rapidement! C'est sûrement que notre intérêt est tellement à la hausse qu'on tourne les pages un peu trop compulsivement!! ;^)
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