#01- PIERRE
Scénariste(s) : José ROBLEDO
Dessinateur(s) : Marcial TOLEDANO
Éditions : Dargaud
Collection : X
Série : Ken games
Année : 2009 Nb. pages : 48
Style(s) narratif(s) : Récit à suivre (1/3)
Genre(s) : Récit psychologique, Thriller, Drame sportif
Appréciation : 3.5 / 6
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Ou la double vie de menteurs invétérés...
Écrit le jeudi 07 janvier 2010 par PG Luneau
J’aime bien l’idée de base de cette série : on nous annonce déjà trois tomes, l’un pour chacun des personnages principaux, Pierre Fermat, Thierrry-Jean Feuille et Anne Parilou. Comme cette dernière se fait appeler Ciseaux dans un certain milieu, nous aurons donc droit à Pierre, Feuille, Ciseaux… version européenne de notre Roche, Papier, Ciseaux! Concept original!
Pour ce qui est du résultat, je suis plus mitigé. Si les dessins sont très jolis et font preuve d’un style original qui me plait bien, le récit, à forte teneur psychologique, demeure un peu confus et, surtout, très difficile à définir ou à caser dans un genre littéraire précis, puisqu’il flirte avec le drame sportif et le policier. Précisons toutefois que cette ambiguïté est peut-être un peu normale pour une histoire qui se targue de raconter la vie secrète de trois individus qui mentent de manière éhontée aux deux autres sur leurs véritables occupations.
Dans ce premier tome, on s’attarde plus particulièrement à Pierre, le matheux, qui, suite à de malencontreux coups du sort, se retrouve à devoir boxer chez les amateurs pour vivoter du mieux qu’il peut. Il en a honte et ne voudrait pas que son copain de fac, Thierry-Jean, apprenne qu’il n’est pas le mathématicien-théoricien qu’il croit qu’il est devenu. Et pourtant, s’il savait pour TJ… ou même pour Anne, la nouvelle petite amie de ce dernier!!!
Le récit laisse une vaste place à l’introspection, alors que chaque personnage se forge les mensonges dont il a besoin… mais cherche surtout à se justifier à lui-même le bienfondé de toutes ces cachoteries! Où se situe le point de non-retour, quand on a tellement menti que l’aveu devient impensable sans tout perdre? Et que faire quand on l’a dépassé? La honte, le doute et la crainte de décevoir sont omniprésents dans ce récit adulte, empli de non-dits et de longueurs.
Le thème est loin d’être inintéressant, en soi, mais je trouve que les créateurs poussent l’exercice un peu loin, ce qui m’a un peu déçu. En fait, je donnerais 3 au scénario, mais le traitement graphique est assez soigné pour que je monte à 3,5 / 6.
Plus grandes forces de cette BD :
- le traitement graphique. Monsieur Toledano réussit assez habilement à intégrer dans son style très européen quelques éléments typiques des mangas. Cela forme un amalgame assez original. Ainsi, les coups de poings avec les traînées de couleur sont bien illustrés. De même, j’ai adoré toute la séquence où on voit le père de Pierre, comme dans un flash-back fantôme. C’est une très belle trouvaille graphique.
- le concept des trois tomes, Pierre/Feuille/Ciseaux, un par personnage. Dommage qu’on débute par le personnage qui semble avoir le secret le moins intéressant.
Ce qui m’a le plus agacé :
- le récit un peu complexe. Comme on s’attarde plus à Pierre, un taciturne désabusé, il y a beaucoup de non-dits. Mais c’est encore pire lorsqu’on nous dévoile quelques uns des secrets de TJ ou d’Anne : comme nous sommes dans l’album consacré au boxeur, on n’apprend rien des motivations ou des objectifs des deux autres… On ne fait qu’être témoin de certains aspects de leur double vie. Comme leurs secrets sont bien plus énormes que celui de Pierre, on aimerait comprendre d’avantage ce qui les a conduits là! Ça m’a un peu dérangé. Espérons que les deux autres tomes éclairciront la situation, surtout en ce qui a trait à Anne.
- les yeux d’Anne et de Cus, dans le style manga, mais trop disproportionnés. C’est comme si on avait plaqué les immenses yeux de la Mini-fée de notre enfance sur le visage de Dina ou de Bouffi des 4 As! Un peu «too much»!
- le nom de famille de TJ, «Feuille», qui me semble très ridicule. On dirait surtout qu’il a été mis en place de manière tout à fait artificielle et plaquée pour arranger le concept du Roche/Papier/Ciseaux.
- la notion de double vie qui est poussée un peu trop à son extrême. Qu’une personne mente à ses proches et mène une double vie à leur insu, je veux bien… mais que trois amis se cachent mutuellement de si grosses préoccupations, ça commence à miner la crédibilité. À moins qu’ils ne soient pas si copains que ça!
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