#01 - YAKITATE JA-PAN!! UN PAIN C'EST TOUT
Scénariste(s) : Takashi HASHIGUCHI
Dessinateur(s) : Takashi HASHIGUCHI
Éditions : Delcourt
Collection : Manga
Série : Yakitate Ja-Pan!! Un pain c'est tout
Année : 2002 Nb. pages : 224
Style(s) narratif(s) : Récit à suivre (1/26) (Manga)
Genre(s) : Quotidien, Aventure humoristique
Appréciation : 5 / 6
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Ou comment rendre les techniques de fabrication du pain passionnantes!
Écrit le lundi 09 juillet 2012 par PG Luneau
Vous saviez, vous, que le pain nan contient du yogourt? Que les croissants ont cette forme parce que les Viennois ont voulu commémorer une victoire sur l’armée turque qui assiégeait leur ville (la Turquie arbore en effet ce même croissant sur son drapeau)? Ce sont là quelques unes des choses que vous apprendrez en lisant le premier tome de Yakitate Ja-Pan!! Un pain c’est tout!, un très agréable shônen manga que j’ai découvert grâce à mes amis Yaneck et Snoopy.
Son résumé est tout simple : tout au long de cette série (complétée, en 26 tomes), nous suivons l’évolution de Kazuma Azuma, un jeune boulanger autodidacte qui ne rêve que d’une chose : parvenir à concevoir un pain si parfait et si délicieux qu’il en deviendrait le pain national japonais, au même titre que la baguette est associée à la France, le pumpernickel à l’Allemagne ou le pain nan à l’Inde!! Comme thème, avouez que c’est pas banal!
Bien sûr, il faut se rappeler que le Japon, comme la majeure partie des pays orientaux, est beaucoup plus porté sur le riz que sur le blé! Le pain n’est vraiment pas un aliment commun dans leur culture, et leur tradition en boulangerie est très jeune, D’où l’originalité du rêve du jeune Azuma! «Mais comment rendre un tel thème intéressant?», me demanderez-vous avec, à juste titre, un zeste d’incrédulité dans la voix.
Est-ce la douce naïveté du héros? Les informations scientifiques (vérifiées et garanties véridiques!!) sur la confection et la cuisson des différents pains? Ou le simple fait de nous faire découvrir la vie d’un fournil, vue de l’intérieur? En fait, je ne saurais le préciser avec certitude, mais une chose est sûre : Takashi Hashiguchi parvient sans problème à nous garder scotchés à son récit avec une surprenante simplicité… et un dessin précis et bien dosé!
Est-ce parce que je suis fils et petit-fils de boulanger que ce manga me parle tant? Pourtant, je n’ai encore jamais mis «la main à la pâte», au sens propre de l’expression!! ;-) J’en ai souvent eu l’intention, ne serait-ce que pour constater à quel point ce genre de connaissances techniques peut se transmettre génétiquement! Et bien sachez que le fait de côtoyer Azuma et ses nouveaux amis m’a encore plus donné le goût de faire le grand saut : je devrais risquer cette expérimentation qui me titille depuis des années d’ici une semaine, tout au plus!!
Évidemment, ce manga à thématique culinaire est dans la lignée du célèbre film Ratatouille, de Pixar, et rappelle beaucoup la série Lord of Burger, dont je vous ai parlée il y a plusieurs mois déjà. Cette ressemblance est d’autant plus renforcée par la scène où Azuma est découvert congelé dans le frigo de la boulangerie, tout comme c’était le cas pour le père des deux héros de Lord of Burger! Doit-on parler ici d’hommage, de la part d’Arleston et d’Alwett (les auteurs de Lord of Burger), plutôt que de copie? J’ose l’espérer, car ce tome de Yakitate Ja-Pan!! est paru dans sa version originale en 2002, huit ans avant l’autre!
Bref, me voilà emballé par cette petite série (eum!?… Peut-on parler de «petite» série lorsqu’on sait qu’elle est composée de 26 tomes??), au point où je me laisserais bien aller à tous les lire, malgré tout. Vais-je conserver ce bel enthousiasme jusqu’au dernier tome? Peut-être pas, mais pour le moment, j’apprécie fortement le plaisir de la découverte, et j’espère chaudement faire office de levure en faisant gonfler votre intérêt pour cette série, qu’on peut lire dès l’âge d’onze ans, sans avoir peur de tomber… dans le pétrin!! ;-)
À lire aussi : la critique de Snoopy.
Plus grandes forces de cette BD :
- le jeu de mot du titre. Contrairement aux innombrables mangas qui prennent un nom anglais ou qui gardent le nom asiatique, pour faire in ou exotique, celui-ci a fait l’effort de se donner un titre (ou un sous-titre, mais quand même) qui reflète un tant soit peu l’esprit du titre original! Si le fameux Ja-Pan qu’Azuma cherche à créer est un petit jeu de mot conçu à partir du nom de son pays et du mot pain (pan), la déformation de l’expression «un point c’est tout!» par «un pain c’est tout!» est tout aussi sympathique, et tout à fait dans le ton.
- la tronche délirante du grand-père, horrible, édenté, mais tellement drôle, et toujours avec l’air de sortir d’une boîte à surprises! Ce personnage n’apparaît que dans le premier chapitre, alors qu’Azuma est toujours à la maison, mais sa bouille est si caractéristique qu’elle déclenche des fous rires instantanés, et reste en mémoire longtemps!
- la grande qualité du trait graphique de Hashiguchi. Il prend le temps de charger ses décors, ce qui n’est pas si fréquent en manga, d’après ce que je constate doucement! Et ses traits sont si fins et précis qu’ils parviennent à donner à certaines vignettes ce fini quasi-photographique propre à de grands maîtres, comme Taniguchi. C’est superbe!
- la cruelle sévérité de Ryô Kuroyanagi, le responsable du concours d’admission de la boulangerie Pantasia. Comme peau de vache, on a rarement vu mieux! C’est un pseudo-méchant qu’on prendra plaisir à détester, ça se sent!... Même si mon petit doigt me dit qu’il prendra le parti des gentils, d’ici la fin de la série!!?...
- toutes les tonnes d’informations sur les pains : leur origine, leur histoire, leurs composantes… C’est des plus intéressants! Souvent parfaitement inutiles, mais d’autant plus passionnants!!
- de belles références culturelles. Notamment le petit clin d’œil au Cri de Munch (tout discret, mais bien reconnaissable, dans le bas de la p.95), ou celui à Neil Armstrong, à la p.135.
- la véritable pub, à la toute fin, pour inciter les jeunes ados français à poursuivre leurs études en boulangerie! Quel beau placement de produit, à la fois intelligent et pertinent!
Ce qui m’a le plus agacé :
- l’absence de titre spécifique aux différents tomes. C’est toujours un peu dommage de désigner un album par son simple numéro. Heureusement, les chapitres possèdent, eux, chacun leur propre titre!
- le look déjà très féminin du héros, accentué par la passe dans ses cheveux… Ça donne à Azuma une allure androgyne dont je ne vois pas l’utilité.
- la trop grande naïveté du héros, et son imbécilité : un gars de seize ans qui ne sait pas ce que c’est qu’un croissant, ça passe difficilement le test de mon «logicomètre», surtout quand ce jeune est un mordu de boulange!!
- la petitesse de la typographie, souvent illisible. C’est pénible de devoir lire à la loupe!! Mes yeux ne sont plus ce qu’ils étaient, c’est vrai, mais il y a des limites au «minusculisme»!!
- la très très TRÈS longue (14 pages!) présentation du maître boulanger qui servira d’expert analyste, à la fin de chacun des tomes français de cette série. Monsieur Vabret est peut-être une sommité dans le monde de la boulange française, et c’est génial de savoir qu’on aura droit à l’avis d’un tel expert tout au long de la série, mais les cinq pages de pedigree, où il décline son interminable curriculum vitae, est d’un ennui mortel… d’autant plus qu’il n’écrit pas très bien, avec beaucoup de structures répétitives! Bref, ces pages auraient dû être remplacées par un encadré d’une page avec la liste de ses médailles, trophées, fonctions et autres nominations de prestige… Ça nous aurait donné un portrait tout aussi impressionnant de ce grand homme, qu’on aurait pu survoler tout à loisir, tout en nous épargnant une ennuyeuse lecture!
- le très long catalogue, en supplément, avec vingt suggestions d’autres mangas de chez Delcourt! J’aime bien avoir des petites suggestions, mais ces 22 pages, à la suite des 14 autres du maître boulanger, ça fait plus d’un sixième du livre qui n’a rien à voir avec le récit! C’est un peu abusif, je trouve!
- le fait que cette série soit considérée comme un shônen manga!!? Pourtant, on ne peut pas dire que l’action y soit flamboyante!! ;-) Oui, il y a de la compétition, mais c’est de la compétition de cuisine! Je ne sais pas à quel point ça rejoint les garçons, au même titre que les combats de monstres ou les courses automobiles, par exemple! En fait, tant mieux si c’est le cas : je serais le premier ravi si nos gars pouvaient faire preuve d’autant d’ouverture d’esprit… mais pour le moment, j’en doute! Bref, j’ai très hâte de présenter cette série aux garçons de mon groupe, l’automne prochain, et de voir si Yakitate… passera le test auprès d’eux!!
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