#01- UNE ODEUR DE SOUFRE
Scénariste(s) : Samuel Parent dit SAMPAR
Dessinateur(s) : Samuel Parent dit SAMPAR
Éditions : Michel Quintin
Collection : X
Série : Guiby
Année : 2013 Nb. pages : 116
Style(s) narratif(s) : Récit complet
Genre(s) : Superhéros / Justicier masqué, Fantastique humoristique, Héros animalier
Appréciation : 4.5 / 6
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Un Monster allergy bien de chez-nous!
Écrit le samedi 02 novembre 2013 par PG Luneau
Enfin!! Il a plongé!!
Quand je dis IL, je veux parler de Sampar, le génialissime et très prolifique illustrateur québécois, dont les dessins pour différents albums et romans jeunesse ont été maintes fois primés (il faut dire qu’il travaille très souvent en collaboration avec son ami Alain M. Bergeron, THE king des écrivains jeunesse des dix dernières années, au Québec!!).
Quand je dis qu’il a plongé, je veux dire qu’il s’est enfin décidé à se mettre à la BD!! Bon, il y tâtait un peu dans Capitaine Statik – une dizaine de planches réparties dans ces romans d’une soixantaine de pages – ou dans les Savais-tu?, qu’il illustre de grosses vignettes pleine planche… Mais aucun album complet à proprement parler. Jusqu’à aujourd’hui. Et il était temps! Car qui mieux que lui, avec son style si gentiment caricatural, d’une efficacité exceptionnelle, pouvait donner à la BD jeunesse québécoise l’élan qu’elle mérite?!! Depuis le temps qu’on attendait une série intéressante au dessin solide, il fallait bien que ce soit du côté de Sampar que ça nous arrive… Il est vrai qu’il est si occupé par tous ses autres contrats qu’il doit avoir beaucoup de difficulté à trouver le temps de s’adonner au plaisir solitaire que constitue ce projet, sur lequel il est seul à la barre!! ;^)
C’est donc avec beaucoup d’excitation que j’ai suivi, de loin, via sa page Facebook, l’évolution de son nouveau bébé… au sens propre du terme, puisque son héros n’est autre qu’un super-bébé, prénommé Guiby!! Bon, d’accord, il a le bébé un peu vieillissant : à trois ans, on n’est plus, à proprement parler, un bébé (même si certains des jeunes de cet âge se comportent encore comme tel!! ;^) Mais ce n’est manifestement pas le cas de Guiby qui, bien au contraire, prend non seulement ses responsabilités mais aussi l’initiative de régler lui-même, comme un grand, son problème.
Et ce problème, il n’est pas des plus simples!! Il s’agit de régler son cas à un horrible monstre qui loge depuis des années dans son placard mais qui commence à l’empêcher de dormir!! Qu’à cela ne tienne : Guiby ne fait ni une ni deux et chasse le pitoyable énergumène de sa chambre… Mais l’exilé promet de revenir se venger, ce qui pousse l’enfant, sous les conseils de Ramirez, un charmant rat latino rencontré sur les entrefaites, à pourchasser le monstre jusque dans les égouts, en pleine nuit!!
Non franchement, il n’a pas froid aux yeux, ce jeune superhéros à la suce au bec! D’abord, précisons qu’il est habile et leste comme un chat : grimper aux murs et aux poutres ne lui fait pas peur, de même que sauter d’un toit à l’autre, comme ces adeptes de parkour qu’on aperçoit dans nos villes, depuis quelques années. Puis, la nuit noire, les ruelles sombres, les égouts malodorants et les nombreux monstres tordus qui s’y cachent ne le font pas hésiter deux secondes!
Car Baska, sa ville, cache une vie nocturne assez mouvementée (et je ne parle pas ici des bars ou des discothèques!!) : les chats, les rats et les monstres s’y disputent leur territoire respectif depuis des lustres, et l’épopée que le gamin entreprend cette nuit-là le forcera à traverser tous ces territoires!! Beaucoup d’action en perspective! Heureusement, Ramirez sera à ses côtés pour le guider et le conseiller!
Vraiment, Sampar a su trouver un bon filon en empoignant à bras le corps les peurs nocturnes des jeunes lecteurs et en nous présentant un superhéros qui se joue d’elles en un clin d’œil. Son récit, bien qu’un peu linéaire, est cohérent, et les personnages jouent merveilleusement bien leur rôle : on s’attache à Guiby et Ramirez, on craint les autres, de Schrödinger, le chat balafré, au monstrueux Germénésis, de l’Ombre sinistre au gigantesque Malone, montagne de muscles et de haine!
Visuellement, on est face à du Sampar!! Si vous aimez les illustrations des populaires séries des Dominique, des Savais-tu?, des Capitaine Statik, des Billy Stuart ou des Alexandre, vous savez déjà à quoi vous attendre. Si vous ne les connaissez pas, je vous garantis que vous voudrez les connaître après avoir découvert le solide coup de crayon qui se dégage de cet album!
En fait, Guiby, c’est une toute nouvelle série fantastique à lire dès 9 ou 10 ans… et qu’on (se!) souhaite longue et prospère ;^)
Plus grandes forces de cette BD :
- le format. J’aime bien la très généreuse épaisseur du volume (116 pages) et sa petite dimension (19 x 27 cm), qui rappelle celle des comics américains… ou celle de la défunte collection Rotor, aux 400 coups! Un tel format se tient bien en main et a peut-être plus de chance de tenir la route dans un petit marché comme le nôtre (quand on pense au nombre de maisons d’éditions québécoises qui se sont cassé les dents en se risquant à publier des BD!!). De plus, l’artiste a su tenir compte de ce format plus restreint, en nous offrant de grandes vignettes bien aérées, en nombre raisonnable (ce que certains auteurs de chez Rotor avaient oublié de faire!).
- l’illustration de couverture… très efficace! Elle punche et donne tout de suite le ton du récit. Arachnophobes et autres chochottes s’abstenir!! ;^)
- le dessin aux traits clairs et très contrôlés. Sampar est, à mon avis, un des meilleurs illustrateurs québécois pour la jeunesse. J’espère qu’on retrouvera sa ligne claire joyeusement caricaturale encore longtemps : les jeunes l’adorent!
- ma gentille (et généreuse!!) dédicace! Non seulement Sampar a tenu à me poster son bouquin parce qu’il apprécie ma Lucarne, mais il m’a en plus fait une superbe dédicace avec Guiby, Ramirez… et un petit Gruffus chapeauté de mon casque d’explorateur!! C’est véritablement charmant (et très apprécié!!) ;^)
- l’idée d’un si mignon gamin comme héros. Proche de Monster allergy et de Tigres et Nounours dans le concept, cette série s’en démarque quand même beaucoup par la jeunesse et la solidité de son héros sans peur et sans reproche… bien qu’il tète toujours sa suce!! ;^)
- l’horreur illustrée. Sampar se permet quand même des bestioles assez horribles merci! Tel son nouvel héros, il n’a pas peur de présenter à ses lecteurs quelques monstres gentillets (comme Gruffus), mais aussi des abominations des plus terrifiantes!! La couverture en offre un très bel exemple! J’espère que toutes ces créatures démoniaques n’effrayeront pas trop le jeune lectorat visé… ni leurs parents, qui jugeront peut-être le livre à sa couverture, justement, et craindront que leurs bambins fassent des cauchemars!?!
- les angles de vue variés et la mise en page, très dynamique malgré son classicisme. J’ai particulièrement adoré le zoom arrière en plongée (pour ne pas dire en piqué!!) de la p.50!
- les lieux J’ai adoré reconnaître, à la p.30, la carte de Victoriaville/Arthabaska (avec le réservoir Beaudet) sur le plan que l’affreux Gruffus s’achète… Ça fait drôle de retrouver cette petite municipalité (où loge ET Sampar, ET Alain M. Bergeron… et d’où JE suis originaire!! ;^) comme siège d’une série. L’auteur aura eu beau donner à sa ville le nom de Baska, je n’ai pas été dupe pour autant…D’ailleurs, tout au long du récit, certains noms de rues comme le boulevard Jutras ou la rue de Bigarré venaient confirmer le tout!! À quand un passage sur la rue Luneau, baptisée en l’honneur de mon grand-père?? ;^)
- la finale… Bien que le récit soit fermé, les trois dernières planches laissent planer un suspense, et nous font d’ores et déjà comprendre que les déboires de Guiby sont loin d’être terminés!
Ce qui m’a le plus agacé :
- les couleurs très sombres et l’encrage très prononcé. Je comprends que la grande majorité du récit se déroule dans les égouts… mais j’aime trop les traits de Sampar pour en perdre autant dans la pénombre qui sévit dans ces lieux glauques! ;^) Dans ce cas-ci, j’ai l’impression que si ça a bien desservi l’ambiance, c’est au détriment du trait…
- l’usage parfois apparent du copier-coller informatique, dans la disposition des différents éléments d’une case, par exemple. On s’en rend compte tout de suite quand on compare l’illustration de la couverture avec son pendant de la p.73, ou dans le cas du zoom arrière de la p.50, dont je parlais plus haut. De même, on peut parfois constater d’un trop grand contraste entre les traits généraux d’une case, d’une épaisseur normale, et la finesse des contours des petits éléments qui s’y trouvent (comme le petit Ramirez, souvent). On comprend tout de suite que Sampar dessine ces petits personnages en grand format, pour ensuite les rapetisser (d’où les contours qui deviennent d’une finesse extrême) et les rajouter dans ses vignettes. Le Griffus qui saute de la fenêtre, à la p.10, en est un bon exemple. Cette cohabitation de traits fins et de traits larges dans la même vignette m’agace un peu.
- l’absence de détail sur les origines des «pouvoirs» de Guiby. Où a-t-il appris à faire du parkour urbain, ce nouveau sport qui consiste à enchaîner les sauts et les roulés-boulés partout sur les murs et les toits des bâtiments? Comment peut-il être si doué… à seulement trois ans!!? Comment se fait-il qu’un si jeune gamin puisse résister à un coup qui lui a fait défoncer un mur de pierres… sans aucune égratignure?!? Et d’où lui vient sa force fulgurante? Bien sûr, on ne peut pas tout apprendre dans un premier tome de série… mais j’ose espérer que tout cela nous sera révélé un jour!!?
- la tête toute étroite du héros, quand il abaisse son capuchon! Je m’attendais tellement à une tête ronde, comme la capuche, que je suis resté sous le choc face à l’étroitesse de sa tête, à la p.112, quand il rabaisse son capuchon!! C’est bête et très personnel, mais je ne m’y fais pas : j’aime autant continuer de le voir avec capuchon et m’imaginer une belle tête rondouillette que d’être confronté à sa petite tête en forme de jelly bean! ;^)
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