#03 - COLCHIQUES
Scénariste(s) : Bruno Chevrier dit NOB
Dessinateur(s) : Bruno Chevrier dit NOB
Éditions : Glénat
Collection : Tchô! la collec...
Série : Mamette
Année : 2007 Nb. pages : 48
Style(s) narratif(s) : Gags en une ou quelques pages
Genre(s) : Humour tendre, Humour social, Quotidien
Appréciation : 4.5 / 6
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Mamette, vous êtes ma soupe «poulet et nouilles» de la BD!!
Écrit le lundi 03 février 2014 par PG Luneau
Tomes lus : #03- Cochiques (2007, 4,5/6)
#04- Entre ciel et terre (2010, 4/6)
Aaaaahhh Mamette! Chère, douce et réconfortante Mamette!
Comment ai-je pu, tel votre ingrat de fils, vous délaisser aussi longtemps? J’espère que vous serez aussi indulgente envers moi que vous l’êtes envers lui, la chair de votre chair, qui vous en fait vivre des vertes et des pas mûres, surtout depuis qu’il a perdu son emploi et qu’il est revenu vivre chez vous!
En me plongeant dans les albums #3 et 4 de votre série, j’ai constaté que c’est toute une année de votre vie à laquelle on vient d’assister!! En effet, je n’avais pas remarqué, en lisant les tomes #1 et 2, qu’ils correspondaient respectivement à un printemps et un été de votre existence. Il m’a fallu les teintes rougeoyantes des feuilles mortes de Colchiques et les bleu-mauve-lilas des cieux hivernaux d’Entre ciel et terre pour m’en rendre compte!!
Si j’ai retrouvé avec bonheur votre petit monde (madame Pinsec, Ginette et vos autres amis du club des Seniors, le petit Maxou que vous gardez encore, votre Choupinet de fils, etc.) et votre quotidien (vos tricots, vos cours d’arts, vos parties de Monopoly… et vos inénarrables déboires avec les nouvelles technologies!!), j’ai surtout été profondément touché par certaines thématiques que votre créateur, Nob, a eu l’idée d’aborder par l’entremise de vos histoires. Quel génie, ce Nob!! Quel habile tricoteur, lui aussi! ;^) Son don à lui, c’est de tricoter vos récits de manière à ce qu’ils aient divers niveaux de lecture, ce qui rend vos aventures non seulement amusantes pour les plus jeunes, mais suffisamment grinçantes pour accrocher les ados… et parfaitement touchantes pour émouvoir les adultes… Et oui, je l’avoue : entre trois ou quatre rires francs et quelques centaines de sourires tendres, j’ai versé des larmes!… Et plus d’une fois!! Fin psychologue, ce Nob! Non seulement il a l’œil qu’il faut pour déceler les travers de notre société, mais il possède de plus l’intelligence pour les présenter de façon tout à fait naturelle et plaisante… et la parfaite touche pour les illustrer avec tendresse, simplicité et, parfois, un délicat soupçon de poésie!
Ainsi, la honte des chômeurs, les relations intergénérationnelles, la solitude des aînés et leurs relations amoureuses, la santé, l’hypocondrie et la maladie d’Alzheimer sont quelques-unes des principales thématiques que ce bédéiste a choisi d’aborder à travers ces deux albums. Avec toute cette effervescence autour de vous, je comprends que vous ayez encore le cœur si jeune!! Vous êtes toujours aussi prête à faire des bulles, à jouer dans les modules de jeux des «fastefoudes» (comme vous les appelez) ou à tenter de nouvelles expériences plus wild… comme de flirter avec un inconnu (!!?!?) ou de sortir votre nouveau cellulaire de son emballage!! ;^)… En autant que vous puissiez poursuivre vos petites routines, comme de prendre soin de cette peste de Maxou tous les mercredis après-midi!
Finalement, très chère Mamette, je vous souhaite que tout plein de nouveaux lecteurs découvrent la pétillante personne que vous êtes et tombent sous le charme de votre gentillesse, de votre naïveté, de votre dévouement et de votre optimisme.
Car… il FAUT lire Mamette!!
Votre tout dévoué admirateur,
Pierre-Greg Luneau
P.S. : Si cette lettre adressée à l’héroïne ne vous a pas convaincus de courir lire ces albums, amis lecteurs, sûrement que les critiques de mon amie Kikine y parviendront, elles!
Plus grandes forces de cette BD :
- les enfilades de gags, qui forment littéralement des séquences qui se suivent. Je ne l’avais pas particulièrement remarqué dans les deux premiers tomes, mais c’était déjà présent : plusieurs des gags, bien qu’ayant un punch à la dernière case de chaque planche, se poursuivent sur deux, trois ou même quatre pages.
- tous les savoureux personnages!! On aura beau dire, des archétypes comme la grincheuse et la dure d’oreille resteront toujours une source inépuisable de gags désopilants! Qu’est-ce qu’elles me font rire, ces deux-là!! Tout comme cette dame, hypocondriaque comme pas deux, ou ce timide… que dis-je, timide!! : ce timoré monsieur Bruneau, qui en pince pour l’exécrable Pinsec!! Il nous apprendra ce qui arrive à ceux qui hésitent trop avant d’ouvrir leur cœur!! Ces personnages sont si exquis qu’on les voudrait comme voisins, comme amis… on s’y attache à un point inimaginable… au point même de préférer écrire une lettre à l’un d’eux plutôt qu’une critique normale!! ;^)
- l’humour, parfois subtil, parfois grinçant, souvent tendre, de Nob. J’ai éclaté de rire à plusieurs reprises (notamment au passage où l’on parle des problèmes d’acné du député Malaqui, à la p.7 du tome #3, ou en voyant entrer madame Ginette dans la boutique de services téléphoniques, deux pages plus loin!!). Et c’est tellement drolatique quand Mamette tente d’aider son fils à se trouver un nouveau boulot (#3 p.19) mais qu’elle ne connaît tellement rien de rien à ce milieu qu’elle ne fait que le caler de plus en plus!!
- la richesse des décors! Encore là, ils étaient bien présents dans les deux premiers tomes, mais je ne les avais pas remarqués autant qu’en lisant ces tomes-ci. Nob ne se contente pas de nous plaquer des à-plats uniformes en arrière-fond de ses vignettes. Il a la générosité de nous illustrer la ville, le parc, l’intérieur de la maison de Mamette avec force détails qu’on gagne encore plus à explorer à la loupe!! ;^) Essayez-le, vous verrez : on y découvre de très jolies surprises, parfois!
- le don que possède l’auteur pour manipuler nos sentiments en un tournemain! La planche de la page 8 (tome #3) en est la meilleure preuve! Alors que l’on s’amuse du fait que notre vieille amie se balade avec un cellulaire encore dans son emballage, elle lance à la vendeuse qui l’interroge sur cet état de fait une toute petite phrase assassine, une de celles qui m’ont ému aux larmes : «En même temps, il ne m’appelle jamais…» C’est fort, très fort… Tout comme les dernières planches du troisième tome ou la triste conclusion du repas de Noël du tome #4 (p.33)! Monsieur Nob, vous savez taper en plein dans le mille, juste là où ça fait mal, et vous avez le fascinant don de nous faire passer du rire aux larmes… au rire à nouveau, en trois ou quatre planches : Chapeau!! D’ailleurs, vous me faites penser : il est grand temps que j’appelle ma maman, moi! ;^)
- la cohérence de l’univers proposé. Encore dans le tome #4, on peut reconnaître, sur le mur du salon de chez Mamette, le dessin d’enfant que Maxou lui avait fait, au tome #1!! On voit que, malgré l’allure anodine des enfilades de gags, Nob construit son univers. Chaque nouveau gag met en place des éléments qui nous mèneront, lentement et sans qu’on en soit conscient, vers un gag ultérieur! C’est très savamment pensé! Toute la «non»-histoire d’amour entre madame Pinsec et monsieur Bruneau, ce cachotier d’écrivain, par exemple, évolue lentement, les poussant l’un et l’autre à se dépasser jusqu’à ce que… mais il vous faudra le lire, pour comprendre toute la touchante complexité de leur relation!
- un petit clin d’œil à Lou! (#3, p.24), cette autre héroïne de la bande de Tchô! J’ai bien aimé, aussi, l’idée de la Maison de retraite Louis de Funès!! Je ne sais s’il existe réellement de tels centres portant le nom de ce grand acteur, en France, mais je me plairais bien dans un tel endroit, il me semble!! ;^)
- les beaux risques que Nob prend, en concoctant parfois des planches complètement muettes. Celle toute en interjections (#4, p.17) est particulièrement éloquente… malgré l’absence totale de mot!!
Ce qui m’a le plus agacé :
- la personnalité du jeune Maxou. Il m’exaspère, ce sale môme, même si sa relation avec Mamette est des plus touchantes! J’ai tellement l’impression que Mamette s’intéresse à cette jeune âme en peine pour ne pas être confrontée à sa propre solitude!! Sous les masques de l’humour et de la légèreté, c’est tout le dramatique de cette situation qui me déprime et me désole!
- une erreur de montage. Il est clair que les pages 44 et 45 du tome #3 doivent être inversées!! C’est dommage qu’on ne s’en rende compte qu’une fois la lecture faite!! Bête erreur d’imprimerie! J’espère que ce sera corrigé lors d’une éventuelle réédition!
- l’apparition du personnage de Lola, fille de Choupinet et petite-fille de Mamette. Comment se fait-il qu’on n’en avait encore jamais entendu parler?? Dans le tome #1, on peut déduire, lors d’un appel entre Choupinet et son ex, qu’ils ont eu un garçon ensemble, mais jamais aucune allusion à une fille!? Qu’une telle jeune femme vienne rendre visite à sa grand-mère, c’est bien… mais après quatre tomes, ça fait un peu plaqué!
- les tirades théâtrales ou les phrases célèbres de monsieur Desplanches, dans le tome #4. Personnellement, j’ai adorées… mais j’ai un doute sur l’impact qu’elles doivent avoir sur les jeunes!? Déjà que la thématique Troisième âge n’est pas d’emblée évidente à présenter à un jeune public, j’imagine mal mes élèves d’une dizaine d’années en train de lire les textes littéraires des phylactères de Desplanches! J’adore le théâtre et je crois que les jeunes d’aujourd’hui doivent être placés en situation de voir, d’entendre ou de lire des extraits de classiques… mais dans le contexte, ici, ça me semble un peu lourd! Oui, ouvrir l’esprit des jeunes, mais je crains que le grand nombre et la complexité des tirades de cet album n’effraient un peu trop ces jeunes en début de «processus d’apprivoisement». J’ai peur que la majorité se découragent et abandonnent leur lecture, ce qui serait bien dommage! ;^(
- l’humour un peu moins efficace du tome #4. Il arrive assez régulièrement que Nob échelonne un gag sur quelques pages, mais auparavant, il s’assurait qu’il y ait un petit punch à la fin de chaque planche. Dans ce tome-ci, ces chutes sont bigrement moins bonnes (ou trop subtiles pour moi!?!). Plusieurs m’ont laissé perplexe ou dubitatif (p.18, 19, 20 ou 35, 36, 37, 38…). Les avancées narratives restent intéressantes, mais quand on est habitué à un gag à chaque dernière vignette, ça fait étrange d’arriver au bas d’une page en se demandant : «Mais… qu’est-ce qu’il y a de drôle, cette fois-ci?? Ai-je loupé quelque chose??»
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