#01- ...TAISEZ-VOUS!
Scénariste(s) : Anne GUILLARD
Dessinateur(s) : Anne GUILLARD
Éditions : Milan
Collection : BD Kids
Série : Pipelettes
Année : 2012 Nb. pages : 56
Style(s) narratif(s) : Gags en une planche (inspiration manga)
Genre(s) : Humour, Quotidien, Autofiction
Appréciation : 5 / 6
|
les Pré-Nombrils!!?
Écrit le samedi 26 septembre 2015 par PG Luneau
Votre jeune fille de dix ans ne vous lâche plus car elle veut impérativement que vous lui achetiez la série BD des Nombrils?? Vous la trouvez encore un peu trop jeune pour être confrontée à toutes les (hilarantes!) bassesses d'adolescence dont cette série regorge?? Qu'à cela ne tienne, je viens de trouver l'album idéal pour la faire patienter!! Il s'agit des Pipelettes, de la Française Anne Guillard. Il n'y a malheureusement qu'un seul tome de sorti, mais j'ose espérer que les éditions Milan poussent pour que l'auteure nous offre un nouvel opus sous peu!? Car on en veut plus! ;^)
Les Pipelettes, ce sont 4 jeunes filles de presque 12 ans qui arrivent en 5e (l'équivalent du secondaire I, ici)... Elles se nomment Agnès, Marie-Hélène, Anne et... Anne!!? Mais attendez avant de reprocher à l'auteure son manque d'originalité!! Car 2 bonnes copines qui ont le même prénom, c'est très possible!! C'est non seulement possible, mais l'auteure l'a personnellement vécu!! Et c'est pourquoi elle a décidé de se mettre elle-même (la première Anne) en scène, en compagnie de ses trois meilleures copines (dont une Anne!), comme si elles vivaient, maintenant, leurs années-collège!!
Ce joyeux quatuor de gamines pourra très avantageusement passer pour une version junior du trio des Nombrils, Karine, Jenny et Vicky... en un peu moins bitches, quand même!! Et encore heureux : elles n'ont quand même que 11ans!! Ce qui ne les empêche en rien d'être aussi solidaires que cinglantes entre elles, un peu à l'instar de leurs grandes sœurs de papier! ;^)
Avec un humour bien affuté, qui m'a fait pouffer à plusieurs reprises, madame Guillard dresse un portrait infiniment juste des préoccupations et des intérêts des jeunes filles de cet âge. Tout y passe : l'école (ah! les surnoms de profs...), les parents, les amies, les premiers flirts (avec les premières dragues maladroites, les premiers baisers pour certaines... et les premières jalousies!!), les sorties, le magasinage, la mode et l'importance du look, les pyjamas-parties («Vérité ou conséquence??» ;^), les appareils orthodontiques et, bien évidemment, les réseaux sociaux!... La vie, quoi!!!?
De plus, elle le fait dans un style de dessin très original et personnel, très coloré et mignon tout plein, avec des traits tout en rondeur. Girly, mais pas trop, le tout est fortement parsemé de codes visuels directement empruntés aux mangas, en un amalgame très chouette, visuellement parlant!
Avec les Pipelettes, toutes les filles d'une dizaine d'années découvriront de chouettes héroïnes, dans lesquelles elles pourront se reconnaître et avec qui elles pourront rêver, par procuration, à leur début de secondaire! En attendant d'en vivre la fin, via les pages des Nombrils ou de Glorieux Printemps!!! ;^)
Expressément conçue pour les jeunes femmes, à partir de 10 ans...même si les plus grandes, ou même les plus grands (comme les jeunes hommes de 48 ans ;^), sauront aussi en apprécier la lecture!!
Plus grandes forces de cette BD :
- une parfaite adéquation texte-image! Les dessins de madame Guillard sont vraiment très sympathiques, et d'une expressivité exceptionnelle! Les couleurs, très franches et variées, renforcent encore plus la vivacité de l'ensemble, et cadrent tout à fait bien avec la fraîcheur et l'énergie des personnages! Une belle réussite, bravo!
- le fait que les 4 personnages soient... 4 véritables amies!? Du moins, c'est ce que l'auteure nous en dit, sur la troisième de couverture!? Vérité ou coup de marketing? Je ne saurais le dire mais, bonne poire comme je suis, il me plait d'y croire! ;^) Maintenant, tout ce qui est raconté là n'est évidemment pas autobiographique! J'imagine que madame Guillard transpose et adapte ses souvenirs au vécu d'aujourd'hui! D'ailleurs, certains référents contemporains en font foi : les beaux Robert Pattinson et Zac Efron, par exemple, ou certains bidules technologiques, I-Pod et autres, qui, sans vouloir vexer l'auteure, n'existaient certainement pas encore, quand elle avait l'âge de son avatar... quelque part dans les années 90, si je ne m'abuse??! ;^)
- les deux rabats de couverture! Ils sont tout à fait charmants, tous les deux, et truffés d'humour, tant celui du devant, où l'on fait connaissance avec les personnages, que celui de derrière qui nous présente l'auteure ou, surtout, son amitié avec les trois autres jeunes filles (devenues femmes depuis, j'imagine!! ;^)
- plusieurs bons trucs. J'ai bien aimé, dès la première planche (p.5), avoir les judicieux conseils d'Anne et de Marie-Hélène au sujet des meilleurs endroits où s'asseoir dans une classe pour pouvoir papoter en paix, preuve à l'appui! En tant que prof, j'en prends bonne note!! ;^) L'ingénieuse astuce pour réussir à convaincre nos parents de faire un pyjama-party chez soi (p.20) n'est pas piquée des vers non plus!! ;^)
- la qualité de l'humour. J'ai vraiment ri de bon cœur à de nombreuses reprises, comme quand Agnès ouvre les hostilités envers Lepillier, à la p.8, ou quand la pauvre Agnès essaie de rester zen malgré son désastre capillaire, à la p.14!! Mais j'ai réservé mes plus grands éclats de rire au glorieux magazine Jeunes et Crétines (p.49) et à l'intérêt immodéré d'Agnès pour... la Péruvie (p.31) !! ;^D
- de belles trouvailles visuelles. La mise en cases est souvent très dynamique (par exemple, au centre des p.16 et 20, ou dans le bas de la p.46) et j'ai adoré cette façon qu'a madame Guillard de colorer uniformément, d'une teinte très neutre, tous les éléments d'arrière-plan d'une vignette pour en faire ressortir un item particulier qui, lui, sera colorisé normalement. Ce procédé est très joliment exploité dans le bas de la p.25! Autres mignonneries à souligner : la présence de petits pingouins, symboles de froidure, aux p.35 et 40, et la façon toute particulière qu'a l'illustratrice de dessiner les langues qui semblent littéralement «flotter» dans les gueules ouvertes de ses personnages, quand ceux-ci crient! On en a plusieurs exemples aux p.9, 20 et 21 !! ;^)
- l'évolution progressive de la trame temporelle. J'ai bien aimé voir le passage des saisons, de la rentrée à Noël... jusqu'à la fin des classes!... (Quoiqu'on y présente la Saint-Valentin avant décembre !!??! :^S ) De même, on peut suivre une certaine évolution des personnages et de leurs relations : les couples qui se forment, puis se laissent... On voit bien que ces gags étaient prépubliés dans un magazine mensuel (très féminin!) : Julie!! ;^)
- l'audace d'avoir osé une planche muette aussi... parlante!! ;^) La p.47 a en effet ceci de particulier qu'elle nous présente les projets de vacances de chacun des protagonistes avec, en prime, la rupture amoureuse de l'une d'entre elles... mais le tout, sans un seul mot!! C'est un beau tour de force qu'Anne Guillard relève avec brio! Chapeau!!
Ce qui m'a le plus agacé :
- le petit jeu des surnoms... Nos 4 héroïnes s'amusent à donner des surnoms méchants à leurs profs et à leurs camarades de classe... Elles en profitent pour se moquer de leurs physiques ou de leurs travers... Ce n'est pas très gentil... Il faut vraiment que je n'aie rien trouvé de trop négatif pour m'attarder à un détail aussi insignifiant, moi!! ;^P D'autant plus que les filles font preuve d'une certaine équité en se donnant, elles-mêmes, quelques surnoms pas trop charitables... dont l'abject : «Salut les morues!!», qu'aucun gars ne pourrait se risquer à lancer, même en blague!! :^o
- une blague (j'espère)... qui n'en est probablement pas une : une jeune qui lit Madame Bovary à 11 ans!!!??? Je comprends bien que le but est de nous faire comprendre que le personnage de Marie-Hélène est une intellectuelle finie, toujours le nez dans les livres ... mais de là à lire un tel classique à un si jeune âge!! J'espère tellement que ce ne soit qu'une blague!!... Malgré que ce qui me trouble le plus, ce sont les grosses probabilités que ce n'en soit pas une!! Pauvre fille!?? :^S
- les références à des vedettes et à des personnages très ancrés dans l'actualité. C'est chouette de nommer Zac Effron et de parler de Bella et d'Edwards, de la trilogie Twilight... mais qui se souviendra d'eux dans 4 ou 7 ans?? Oui, ça donne de la modernité à l'album, mais ça risque de lui nuire, avec le temps. L'auteure aurait très bien pu inventer de toute pièce une (fausse) idole, chanteur ou acteur (Dupuy et Berberian l'ont fait, dans leur série Henriette!), et l'effet aurait été tout aussi efficace, peu importe qu'on lise l'album maintenant ou dans 15 ans!!
- quelques petites expressions argotiques qui seront plus difficiles à interpréter de ce côté-ci de l'Atlantique. C'est ainsi que j'ai croisé, pour la première fois, le mot ragnagnas! Heureusement, il y a Internet : on y trouve réponse à tout, même aux questions les plus triviales!! ;^)
|