#01- GAFFE AU NEVEU!
Scénariste(s) : Jean LÉTURGIE, Yann Le Pennetier dit YANN
Dessinateur(s) : Simon LÉTURGIE
Éditions : Marsu productions
Collection : X
Série : Gastoon
Année : 2011 Nb. pages : 48
Style(s) narratif(s) : Gags en une planche
Genre(s) : Humour, Quotidien, Hommage
Appréciation : 4 / 6
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Quand Gaston fait dans le junior!
Écrit le vendredi 17 janvier 2014 par PG Luneau
Titres lus : #01 – Gaffe au neveu (2011, 4 / 6)
#02 – Des vertes et des pas mûres (2012, 4,5 / 6)
Gastoon, vous lui connaissez déjà la binette!! Pour sûr, puisqu’il a exactement la même tête que son très célèbre oncle, Gaston Lagaffe!! D’ailleurs, c’est à Franquin lui-même qu’on doit la création du personnage! En effet, ce jeune gamin de huit ou neuf ans est apparu pour la première fois dans une planche publicitaire de Gaston, que Franquin avait commise pour Kodak, dans un Spirou de 1973! Mais jamais on ne l’avait vu dans un album régulier… jusqu’à ce jour! Car les Léturgie (père et fils), accompagnés de leur pote Yann, ont eu l’idée de le reprendre et de lui faire vivre ses propres gags.
C’est ainsi qu’on se retrouve maintenant avec deux albums de Gastoon, un jeune dégourdi et allumé, presque aussi ingénieux que son célèbre oncle… et à peine moins gaffeur! ;^) D’abord en ville, avec sa bande de copains de classe, puis à la campagne (dans le second tome), avec les petits voisins de son grand-père, il s’amuse et fait les 400 coups… mais toujours en démontrant un profond respect pour la nature, l’écologie et les sciences de l’environnement. Et si, très souvent, c’est monsieur Lemat, le «pion» (ou surveillant) de son école, qui écope, il lui arrive aussi, parfois, d’être le dindon de ses propres farces.
Contrairement à celui du Petit Spirou, beaucoup trop porté sur la découverte de la sexualité, l’humour de Gastoon est très familial : on est dans les gags de la trempe des Boule & Bill, ou de la Famille Fohal (si des réminiscences de cette dernière série me sont venues, c’est très certainement à cause du dessin, qui rappelle beaucoup celui de Seron, lui-même émule de Franquin). Un humour très abordable, donc, qui, bien qu’il ne bouleverse pas le genre, fait sourire plus souvent qu’à son tour.
Évidemment, face à un humour aussi classique (c’est du Cédric, de l’École Abracadabra, de l’Élève Ducobu…), plusieurs puristes ont crié au sacrilège! «Pourquoi avoir plongé l’iconique Gaston dans la sauce «la Jeunesse de…», comme on l’a fait pour Spirou, Lucky Luke, Lanfeust, Astérix (le temps d’un album illustré)… ou même Boule & Bill (qui ont maintenant une petite série d’albums illustrés racontant leur «jeunesse»!), sinon pour profiter de la manne?!!» À ceci, j’objecterais que, du lot, on se trouve probablement ici en présence de l’univers le mieux adapté, avec le niveau de gags le plus intéressant!
En somme, un seul aspect de cette série m’a fait sourciller, et c’est la composition de la bande d’amis de Gastoon. D’abord, rappelons-nous que ce Gastoon est le neveu de Lagaffe, et bien qu’on ne voit jamais ce dernier, on le sait bien vivant (d’autant plus que le gamin arrive souvent en disant : «Regardez l’invention que mon oncle vient de me prêter!»). Pourtant, les copains de classe du héros ont les têtes et les noms de Mlle Jeanne, de Jules (de-chez-Smith-en-face), de Bertrand Labévue… et même de De Mesmaeker, tous personnages incontournables de la série originale Gaston. Comment est-ce possible? Ce ne peut pas être ces mêmes personnages quand ils étaient petits, puisque le Gaston original est adulte, et qu’il côtoie quotidiennement, leur version «adulte», dans les bureaux de Spirou. Donc, ces enfants s’adonnent à être les «sosies» des comparses du grand gaffeur??… Et, étrangement, ils portent les mêmes noms!!?? Ça fait beaucoup de coïncidences, beaucoup trop! Si cela peut passer pour De Mesmaeker, puisque c’est un nom de famille (il pourrait s’agir du fils ou du petit-fils du fumant homme d’affaire), je m’explique mal que Mlle Jeanne ait une petite sœur, ou une nièce, qui porte son prénom en plus de son visage!!! Et idem pour le Jules et le Bertrand! Bref, ces étranges hasards font que ça coince un peu… Peut-être est-ce d’ailleurs la raison pour laquelle le deuxième recueil de gags fait table rase de ce contexte urbain et transporte Gastoon chez son grand-père, à la campagne, avec une toute autre bande de joyeux garnements?!
Quoi qu’il en soit, malgré ces quelques distorsions, cette série mérite le détour, et c’est sans contredit que je l’ajouterais à la bédéthèque de tous mes élèves, dès 8 ou 9 ans.
Plus grandes forces de cette BD :
- la couverture. J’aime son doux fini satiné et mat, avec certaines zones glacées qui donnent du relief au héros, au titre et à certains petits éléments de l’illustration. J’aime aussi le fait que la maquette suive dans ses grandes lignes celle des albums originaux de Gaston (typographie du logotype, prédominance de bleu ciel…)
- les nombreux clins d’œil. Au fil de ma lecture, j’ai pu débusquer un album de Lou! (#1, p.6), un t-shirt à l’effigie d’un des Schtroumpfs (#1, p.13), des toutous de Pokémon, du Marsupilami, de Goofy et des posters des Lapins crétins et du Petit vampire (#1, p.32)… On y fait même des allusions à ce cher Gaston, avec la colonie de vacances la Mouette rieuse (#1, p.44) ou sa vieille bagnole (#1, p.32, merci, Placard à BD)! On pousse même l’hommage plus loin en nous montrant, en arrière-plan, deux autres personnages du grand Franquin : Modeste et Pompon (#2, p.20)! Le neuvième art est donc bien représenté, et de façon très éclectique!! ;^)
- quelques bons gags. Parfois un peu absurdes, comme celui du labyrinthe de neige (#1, p.19), parfois intéressants pour initier une réflexion, comme celui du chandail en poil de tchipoutchi (#1, p.21). J’ai bien aimé la récurrence de certains gags, misant souvent sur la célèbre règle de 3, en humour : le soccer au square, l’itinérant, le babyfoot, le petit serpent Caducet… Insister sur ces gags leur donne encore plus de poids. Et le gag du sapin de Noël (#1, p.18), ne serait-il pas une reprise à peine revisitée d’un gag de Gaston?!! ;^)
- les quelques jeux de mots! J’ai particulièrement apprécié le «Cellulite finale!» (#1, p.24), le «Il minerve!» (#1, p.26) et le «Haras qui rit» (#2, p.17), ou quand Gastoon et Wilco s’infiltre au club équestre sous les noms d’Aglaé et Sidonie (#2, p.17)!! Sans compter que le nom de ce centre, le Sabot d’Hélène, est un beau clin d’œil à ce cher Brassens, tout comme le «Gare aux morilles!» crié par Gastoon (#2, p.6)!!
- les préoccupations écologiques dont font preuve tous les jeunes personnages. Déjà que cette thématique était chère à Gaston, on peut constater qu’elle est encore plus présente auprès de la jeune génération : recyclage, reboisement, lutte antipollution, nourriture biologique… En ce sens, l’esprit vert du tonton est encore bien d’actualité… D’ailleurs, tout comme son oncle, Gastoon commence à s’entourer de pas mal de petits animaux de compagnie : Rocco le perroquet, Chlorophylle le hamster, puis Caducet le serpent… Tel oncle, tel neveu! ;^)
Ce qui m’a le plus agacé :
- l’absence de séparation entre les gags : ni titre, ni petite illustration de haut de page… On peut parfois avoir l’impression trompeuse que tout s’enfile à la suite, alors que ce n’est jamais le cas! Autre solution possible : apposer une signature en bas de planche? Ça ferait très Franquin, ça aussi, comme look!! ;^)
- la présence des mini-Jules, mini-Jeanne, mini-Bertrand et mini-De Mesmaeker. J’ai bien expliqué le phénomène plus haut, je ne m’étendrai donc pas sur l’improbable présence de ces «neveux et nièce» (une autre hypothèse??!), tous ensemble dans la même classe!!
- les couleurs. Je trouve que Gom, le coloriste, y est allé un peu trop mollo, principalement dans le tome #2. Ses couleurs me sont apparues plutôt fades, pâlottes. J’aurais aimé plus de pimpant!!
- le changement radical d’environnement, entre les deux tomes. Ça fait étrange de quitter la petite bande mise en place (Jeanne, Jules et cie) aussi tôt dans la série, pour s’initier tout de suite à d’autres copains (Wilco et Elvire) et ennemis (Bazin et Torchenez). Nonobstant mes réserves face à la composition de la bande originale, il me semble que ce genre de renouveau, les auteurs se le payent habituellement au bout de quelques tomes, pour diversifier leur univers, ou quand ils veulent varier leur type de gags. Dès le tome #2, ça me semble très tôt! (Ceci dit, le second contexte, campagnard, est aussi intéressant que le premier! ;^)
- l’omniprésence de Lemat, le surveillant. Son rôle me semble un peu trop extensible. Est-ce qu’un surveillant scolaire peut réellement se retrouver en sortie scolaire (de spéléo, par exemple) avec les jeunes de son école?? Ça me semble assez peu probable, chez nous du moins!
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