#05- À DEUX, C'EST MIEUX!
Scénariste(s) : Daniel SHELTON
Dessinateur(s) : Daniel SHELTON
Éditions : les 400 coups
Collection : Strips
Série : Ben
Année : 2000 Nb. pages : 104
Style(s) narratif(s) : Strips
Genre(s) : Humour tendre, Quotidien
Appréciation : 4 / 6
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Une retraite juste assez mouvementée!
Écrit le samedi 05 avril 2014 par PG Luneau
Titres lus : #05 – À deux, c’est mieux! (2000)
#06 – Danse toujours! (2001)
#07 – le Meilleur ami de l’homme (2002)
Ah! Ces chers Hatley! Quelle charmante famille, quand même! On voudrait tous les avoir comme voisins, tant Ben et Olivia, les deux sympathiques jeunes retraités, que leur fille Linda, avec son mari Nathan et leurs enfants… de plus en plus nombreux!!
Je vous ai parlé à de nombreuses reprises (ici, ici, ici et ici) de toute cette smala, et du bonheur que l’on peut ressentir en lisant les strips racontant leur petit quotidien, avec un gentil petit humour malicieux! Ma lecture des tomes #5, 6 et 7 de cette collection n’a pas dérogé à la règle : j’y ai retrouvé le même doux plaisir en redécouvrant les dessins toujours aussi simples mais pourtant si efficaces de Daniel Shelton, de même que le regard amusé (et amusant!) qu’il porte sur les petites anecdotes qui parsèment la banalité de notre quotidien à tous. L’avantage de Ben, c’est que, puisqu’il est à la retraite, il peut se permettre de s’attarder à ces mille et un petits moments magiques, cocasses, tendres ou un peu absurdes, les portant ainsi à notre conscience à nous, lecteurs obnubilés par le stress de l’incessante routine que nous impose notre vie professionnelle!
J’ai donc plongé avec un plaisir non dissimulé dans les tomes #5, 6 et 7 de cette belle petite collection de chez les 400 coups, voyant vieillir du même coup notre charmante famille de trois nouvelles années… puisque les personnages de cette série vieillissent «en temps réel», si je puis dire! ;^) Ainsi, on assiste à des moments-clés de leur existence : la coquine mademoiselle Gredine, celle qui courtise secrètement Ben avec beaucoup d’insistance, aménage tout près de chez-lui ; Linda et sa petite famille font un petit voyage à Vancouver pour visiter les parents de Nathan (ce qui donne l’occasion à grand-papa Tokoname de livrer une partie très touchante de son histoire personnelle) ; Ben finit par convaincre Olivia d’avoir un chien… tandis que Linda et Nathan se décident à avoir un troisième bébé!!
Mais en plus de ces grands changements, on assiste surtout à une foule de petites situations comme nous en vivons tant, tous autant que nous sommes : un anniversaire de mariage oublié, un combat sans merci contre les pissenlits, l’émerveillement d’un enfant face à une luciole, la pose d’un nouveau système d’alarme qu’on ne maîtrise pas trop, des grands-parents «gonflables» (qui s’entêtent à surenchérir de plus en plus pour obtenir les câlins de leurs petits-enfants!), un week-end en amoureux dans un petit Couette et Croissants, un enfant qui se cache lors d’une sortie dans un magasin à grande surface…
Vraiment, peu importe votre âge, votre condition maritale, le fait que vous ayez ou non des enfants… cette série vous touchera en plus de vous faire sourire!! En effet, grâce à la présence de ces trois générations, Daniel Shelton ratisse assez large pour atteindre tous les cœurs! Si vous ne vous reconnaissez pas dans tel contexte, vous y reconnaîtrez votre mère, votre cousine, votre voisin ou un collègue de travail! Avec Ben, c’est du plaisir assuré!
Pour ce qui est de la suite, toutefois, ce sera un peu plus compliqué! En effet (et je vous en ai d’ailleurs déjà glissé un mot dans mon compte-rendu du dernier Festival de la BD francophone de Québec), Daniel Shelton vient de transférer ses droits chez la Pastèque, suite à l’abandon, par les 400 coups, de son volet BD. Je suis vraiment très content que monsieur Shelton ait pu trouver aussi vite un nouvel éditeur pour prendre la relève (et je le souhaite ardemment à d’autres super-séries, comme l’Académie des chasseurs de primes ou Lionel et Nooga, qui tardent malheureusement à ce faire!! ;^).
Toutefois, la Pastèque a décidé de publier l’œuvre de Shelton en tomes-compilations regroupant chacun deux années de gags à la fois. Ainsi, ils viennent de publier le tome avec les neuvième et dixième années de Ben, tome portant le numéro 5. Mais pour ce qui est des tomes #1, 2, 3 et 4 (qui regrouperont respectivement les années 1 et 2, 3 et 4, 5 et 6 puis 7 et 8 de la série)… et bien il faudra voir comment se règleront les ententes de rachat des droits ou autres points juridiques litigieux du même genre!!
Donc, si on peut d’ores et déjà lire les gags des 9e et 10e années de Ben… il nous est impossible, à moyen terme, de lire ceux de la 8e année, coincés qu’ils sont dans cet imbroglio juridique!!?! Zut!! D’autant plus que le tome #7 se terminait sur un climax, alors que Linda était à la veille d’accoucher de son troisième enfant et que le jeune Nicolas allait vivre sa première journée d’école!!! J’imagine que l’attente fera en sorte que j’apprécierai encore plus ma lecture, dans quelques années, lors ce futur album paraîtra?! ;^)
À lire aussi : l’opinion de ma grande amie Venise sur le personnage en général, et le tome #6 en particulier!
Plus grandes forces de cette BD :
- mes dédicaces des tomes #5 et 6! Faites à trois ans d’intervalle, elles sont toutes les deux subtilement charmantes : Ben qui dort avec le jeune Nicolas sur la bedaine (je vous l’ai montrée ici), puis Ben qui tient ce même Nicolas à bout de bras, en plissant le nez assez distinctement pour que l’on comprenne qu’une «opération changement de couche» est nécessaire!! Vraiment très chouette! ;^)
- le nom attribué aux petits-enfants de Ben. La dédicace de chacun des tomes le confirme à tous ceux qui ne le savent pas déjà : Nicolas et Michaël, les deux jeunes enfants de Linda, portent les noms (francisés) des deux fils ainés de Daniel Shelton… Et pour ceux qui crient à l’injustice à l’égard des deux plus jeunes enfants de l’auteur, je vous rassure tout de suite (et vous évente ainsi un secret de Polichinelle!!) : Linda aura deux autres enfants, Alec et Mia, ce qui comblera tout le monde!! D’ailleurs, Linda est justement très très très enceinte à la fin du tome #7!! ;^)
- la fluidité et la polyvalence des traits de monsieur Shelton. Son dessin est véritablement d’une efficacité exceptionnelle. On n’a qu’à regarder les faces trognonnes, charmantes… ou parfois même malicieusement machiavéliques de Nicolas…. ou même de Michaël, maintenant, pour s’en convaincre : un trait simple qui est parfaitement maîtrisé est capable de miracle! Chapeau, monsieur Shelton!
- les très nombreux petits épisodes, quand l’auteur prend un thème et l’exploite pendant trois, quatre ou cinq strips de suite (parfois plus!!). J’ai toujours eu un faible pour ce genre de gags récurrents. Comme je dis toujours, ils mettent de la chair autour de l’os, donnent de la consistance aux situations. De plus, monsieur Shelton fait vraiment preuve de beaucoup d’ingéniosité en construisant ces gags, car il parvient à tous les garder autonomes (pour les lecteurs occasionnels qui tombent dessus par hasard, dans le journal, un jour) tout en réussissant à bien les enchaîner de manière à ce qu’il n’y ait pas trop de redites, quand on les lit les uns à la suite des autres! C’est tout un art, ça, et monsieur Shelton le maîtrise bien!! ;^)
- certains décors plus fouillés, comme celui du 2e strip de la p.71, dans le tome #5, ou tous ceux du segment où monsieur Tokoname raconte à Nicolas son séjour dans les camps de confinement pour Japonais, durant la Seconde Guerre mondiale! Shelton nous y démontre une nouvelle facette de son talent : un style pas mal plus réaliste que ce à quoi il nous avait habitués.
- tout ce passage du camp de confinement, justement! Quel épisode fascinant!! Je ne savais même pas que le gouvernement canadien avait procédé à de telles mesures coercitives durant la guerre!! Raconté ainsi par un proche de la famille, cet épisode se pare d’une humanité particulièrement touchante et cruelle. Heureusement, ici, tout finit bien… mais on peut facilement imaginer que ce ne fut pas le cas pour tout le monde, dans la réalité!!
- voir de quoi Ben avait l’air trente-cinq ans plus tôt!! Le 3e gag de la p.102 du tome #5 nous les montre, Olivia et lui, alors qu’ils devaient être jeunes mariés… et c’est vraiment rigolo de voir à quel point ils se ressemblaient déjà (Remarquez : je parle d’eux comme s’ils avaient vraiment vécu cette époque!!??)! ;^)
- certains cadrages ou angles originaux. La rotation de la vignette centrale, à la p.56 du 7e tome, les quelques strips en une case, comme celui, désopilant, du haut de la p.15 du tome #6 ou la contre-plongée de la p.23 de ce même album en sont de petits exemples probants! Évidemment, le format strip limite considérablement les possibilités d’innovation en la matière, mais compte-tenu des contraintes du genre, Shelton s’en tire plutôt bien!
- la fin du tome #7, qui nous laisse sur un petit suspense agréable : la première journée de classe de Nicolas… et une Linda qui est sur le point d’éclater tellement elle est enceinte!! J’anticipe tellement que les deux événements vont avoir des incidences l’un sur l’autre!!? Quel dommage de savoir que je n’en aurai pas confirmation avant longtemps, tant que la quatrième compilation de la Pastèque ne sortira pas… :^(
- la grande variété des situations proposées! Il serait tellement facile de tomber dans la redite!! Monsieur Shelton a vraiment le don de toujours trouver de nouveaux gags, de nous présenter des contextes différents, et ce, malgré les incontournables annuels (l’Halloween, Noël, la composition des plates-bandes…). En effet, puisque les strips de Ben se déroulent à peu près en temps réel, l’auteur se retrouve aussi à devoir jongler avec l’éternel cycle du passage des saisons et des activités qui s’y rattachent. Un beau défi, qu’il relève avec brio!
Ce qui m’a le plus agacé :
- le langage des jeunes ne fait pas toujours naturel. Par exemple, quand Nicolas dit «Film effrayant!» (p.25 du tome #5, strip #1) ou «N’est-ce pas pour ça que tu as un nombril?» (p.73 du tome #7, strip #3), je trouve que ça sonne un peu faux dans la bouche d’un gamin de cet âge.
- une petite coquille à la p.103 du tome #5 (strip 2). «Voilà donc ne leçon bien importante…». L’espace pour le U oublié est même bien visible!!
- quelques structures de phrases insatisfaisantes… Certaines sont peut-être dues à des petits problèmes de traduction?? Sans être spécialiste, il me semble que des répliques comme celle de la quatrième de couverture du tome #5 («Ça n’a pas l’air bien!» dans le sens de «Ça ne te va pas bien!»), ou «J’lui ai dit de trouver de l’ombre sinon sa glace va fondre…» (dernière case de la p.100 du tome #7) ne se disent pas, non?! Il en va de même pour «C’est pas un peigne dont tu vas avoir besoin à l’avenir! T’as plutôt besoin d’un plumeau!» (strip #1 de la p.78, tome #6)… Et que dire, dans le bas de cette même page, du «J’peux pu!» de Linda, ou de son «C’est moi qui __ suis allée.» (p.9 du tome #6, premier strip) : Va pour des phrases à tournure plus orale, mais là, est-ce que ça ne va pas un peu trop loin?? :^(
- l’absence de Mlle Grenadine des tomes #6 et 7!! Dans le tome #5, on a droit à une série de strips (une bonne dizaine, tous tordants!!) où cette vieille bibliothécaire annonce à Ben et Olivia qu’elle habitera désormais tout près d’eux, épisode au cours duquel elle ne se gêne pas pour faire du genou à Ben, en insistant très fort pour qu’il comprenne son intérêt! ;^) Puis : pfuittt!!! On la perd de vue pour deux ans!! Évidemment, monsieur Shelton ne veut pas tomber dans la redondance (sa versatilité est d’ailleurs une de ses grandes qualités!)… mais j’aurais tout de même aimé retrouver ce désopilant personnage au moins une ou deux fois par année… surtout qu’elle habite maintenant à deux pas!! ;^)
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